Protection contre le licenciement après un accident du travail : l’importance de la visite médicale de reprise
Protection contre le licenciement après un accident du travail : l’importance de la visite médicale de reprise
Posté le dans Social par ComptaCom.
Protection contre le licenciement après un accident du travail : l’importance de la visite médicale de repriseLorsqu’un salarié est victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, le Code du travail lui garantit une protection particulière contre le licenciement. Cette sécurité juridique constitue un droit fondamental qui assure au salarié de conserver son emploi pendant sa période d’incapacité temporaire de travail.
Toutefois, la fin de cette protection soulève des questions complexes que vient de trancher récemment la Cour de cassation. La reprise de l’activité professionnelle à la suite d’un arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle ne marque pas automatiquement la fin de cette protection : c’est la réalisation effective de la visite médicale de reprise qui constitue le véritable point de rupture.
Le régime de protection du salarié accidenté
Le régime de protection du salarié contre le licenciement après un accident du travail s’inscrit dans le cadre plus large de la Sécurité sociale et de la prévention des risques professionnels. Cette protection vise à éviter qu’un employeur ne se sépare d’un salarié uniquement en raison de son état de santé consécutif à un accident survenu sur le lieu de travail.
Les principes fondamentaux de cette protection :
- Interdiction de licencier pendant l’arrêt de travail consécutif à l’accident ;
- Maintien du contrat de travail pendant la période d’incapacité ;
- Garantie de retrouver son poste ou un emploi équivalent ;
- Indemnisation par l’assurance maladie professionnelle.
Cette protection n’est cependant pas absolue. L’employeur peut procéder au licenciement en cas de faute grave du salarié ou d’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’accident.
L’obligation d’une visite médicale de reprise
La visite médicale de reprise constitue un élément clé du dispositif de protection de la santé au travail. Elle permet au médecin du travail d’évaluer l’aptitude du salarié à reprendre son activité professionnelle après son arrêt.
Cette visite est obligatoire dans plusieurs situations :
- Arrêt de travail d’au moins 30 jours à la suite d’un accident du travail ;
- Arrêt consécutif à une maladie professionnelle, quelle que soit sa durée ;
- Arrêt de travail d’au moins 60 jours pour maladie ou accident non professionnel ;
- Congé de maternité.
Le délai pour organiser cette visite est strict : elle doit avoir lieu dans les 8 jours suivant la reprise effective du travail. C’est à l’employeur qu’incombe la responsabilité d’organiser cette visite auprès du service de santé au travail de l’entreprise.
Conséquences de l’absence de visite médicale
L’absence de visite médicale de reprise, lorsqu’elle est obligatoire, entraîne des conséquences juridiques majeures. Le salarié continue de bénéficier de la protection contre le licenciement tant que cette visite n’a pas eu lieu, même s’il a effectivement repris son travail, puisque son contrat est toujours considéré comme étant suspendu.
La décision récente de la Cour de cassation
Un arrêt du 14 mai 2025 illustre parfaitement l’importance de cette visite médicale dans la détermination de la fin de la période de protection.
Les faits de l’espèce
Au retour dans l’entreprise d’un salarié victime d’un accident du travail ayant entrainé un arrêt de travail de plus de 4 mois, l’employeur avait clairement manifesté son intention de ne pas le conserver, sans toutefois engager de procédure de licenciement. Face à cette situation, le salarié engage une action pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur.
La question centrale portait sur le caractère de cette résiliation judiciaire : devait-elle produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou ceux d’un licenciement nul ?
L’apport jurisprudentiel
La Cour de cassation rappelle que seul l’examen pratiqué par le médecin du travail, lors de la reprise du travail, met fin à la période de suspension du contrat de travail et par conséquent que la période de protection contre le licenciement ne prend fin qu’avec la réalisation effective de la visite médicale de reprise, lorsque celle-ci est obligatoire.
Par conséquent, si le salarié n’a pas bénéficié de la visite médicale de reprise, il bénéficie encore à la date de la rupture de son contrat de travail de la protection accordée aux victimes d’accident du travail et la rupture du contrat intervenue dans ces circonstances produit les effets d’un licenciement nul. Cette position jurisprudentielle renforce considérablement la protection des salariés. En effet, l’employeur ne peut pas considérer que la protection a pris fin du seul fait de la reprise du travail par le salarié.
Impact financier de cette protection
Les conséquences financières de cette distinction sont considérables pour les entreprises puisque l’indemnisation varie significativement selon la qualification juridique retenue.
Licenciement sans cause réelle et sérieuse
En cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, le montant de l’indemnité est encadré par le barème Macron. Pour un salarié ayant moins d’un an d’ancienneté, cette indemnité ne peut excéder un mois de salaire brut.
Licenciement nul
À l’inverse, en cas de licenciement nul (rupture pendant la période de protection), le salarié peut prétendre à une indemnité minimale équivalente à 6 mois de salaire brut, indépendamment de son ancienneté dans l’entreprise.
Cette différence de traitement s’explique par le caractère particulièrement protecteur du régime applicable aux victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles.
Obligations de l’employeur et prévention des risques
Cette jurisprudence renforce les obligations des employeurs en matière de suivi médical des salariés. Au-delà de l’aspect purement juridique, elle souligne l’importance d’une gestion rigoureuse des retours de salariés après un accident du travail.
Bonnes pratiques pour les entreprises
Les entreprises doivent mettre en place des procédures claires :
- Programmation systématique de la visite médicale de reprise ;
- Suivi des délais réglementaires (8 jours maximum) ;
- Coordination avec le service de santé au travail ;
- Formation des managers sur ces obligations ;
- Documentation de toutes les démarches entreprises.
Perspectives et enjeux futurs
Cette évolution jurisprudentielle s’inscrit dans la démarche de protection des salariés victimes d’accidents professionnels. Elle reflète également l’importance croissante accordée à la santé au travail et à la prévention des risques.
Les entreprises doivent adapter leurs pratiques pour tenir compte de cette nouvelle donne juridique. Cela implique notamment de revoir les procédures internes et de sensibiliser les équipes RH à ces enjeux.
La sécurité au travail demeure un enjeu majeur nécessitant une approche globale intégrant prévention, suivi médical et respect scrupuleux des droits des salariés victimes d’accidents professionnels.
Cette jurisprudence rappelle que la protection du salarié ne s’arrête pas à sa simple reprise du travail, mais nécessite un accompagnement médical approprié matérialisé par la visite de reprise obligatoire.
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