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Sous-location d’un immeuble pris en crédit bail par une SCI : conséquences de la levée d’option

Sous-location d’un immeuble pris en crédit bail par une SCI : conséquences de la levée d’option

La levée d’option d’un crédit-bail immobilier est fiscalement et financièrement onéreuse.

Le Conseil d’Etat vient de confirmer la position de l’Administration suivant laquelle une SCI qui lève l’option d’achat prévue dans un contrat de crédit-bail immobilier doit constater à cette date une plus-value imposable alors même qu’elle continue de mettre l’immeuble à la disposition de l’entreprise utilisatrice.

L’affaire tranchée par la Haute Assemblée concerne un différend apparu il y a plus de vingt ans entre les contribuables et l’Administration dans le cadre de modes de financement immobilier très courants. Il s’agit des démarches par lesquelles une société civile immobilière prend un immeuble professionnel en crédit-bail pour le sous-louer à la société utilisatrice. La SCI, dont la majorité des parts est souvent détenue par le dirigeant de la société d’exploitation, devient propriétaire de l’immeuble à l’échéance du contrat et le loue ensuite à la société dans le cadre d’une location simple. Le Conseil d’Etat estime que la levée de l’option d’achat par la SCI entraîne la constatation d’une plus-value imposable.

L’Administration avait mentionné à l’occasion d’une réponse ministérielle que l’exercice de l’option d’achat à l’échéance du contrat de crédit-bail immobilier implique l’imposition de la plus-value latente constatée à raison de l’immeuble. Cette prise de position avait déclenché de violentes réactions des praticiens étant donné qu’elle aboutit à contraindre les membres de la SCI à une imposition souvent lourde en pratique, alors que la société n’a réalisé aucune opération procurant la trésorerie pour y faire face. De plus, l’acquisition de l’immeuble ne présente aucune rupture sur un plan économique puisque la société continue de mettre l’immeuble à la disposition de l’entreprise utilisatrice.

Mais le Conseil d’Etat conteste cette approche et tire toutes les conséquences des opérations juridiques réalisées par la SCI. Il justifie sa décision par le fait que l’exercice de l’option d’achat prévue au contrat a impliqué une modification d’activité de la société : elle a stoppé son activité de sous-location pour une activité de location directe relevant des revenus fonciers. Le changement de régime fiscal qui en résulte rend aussitôt imposable la plus-value acquise à cette date par l’immeuble.

Dans ses conclusions, le rapporteur public Nathalie Escaut présente une analyse identique à celle que l’Administration avait conduite. Après avoir rappelé que l’activité de sous-location à laquelle se livre initialement la SCI relève, suivant une jurisprudence constante, des bénéfices non commerciaux (voir, par exemple, CE 21-10-1987 n° 51367), elle précise que la mise en location simple de l’immeuble entraîne son transfert dans le patrimoine privé de la SCI, puisque ses revenus ont par la suite le caractère de revenus fonciers. C’est pourquoi la levée d’option souligne le « changement d’activité » de la SCI. Il faut donc tirer les conséquences de cette cessation fiscale d’activité et soumettre à l’impôt les plus-values d’actif, conformément à l’article 93 du CGI.

En approuvant cette analyse, la Haute Assemblée élargit au contexte du crédit-bail immobilier la jurisprudence selon laquelle la mise en location d’immeubles précédemment affectés à l’exercice d’une activité non commerciale entraîne le transfert de ces immeubles dans le patrimoine privé de l’exploitant et donc la constatation d’une plus-value imposable.

L’évaluation de la plus-value imposable nécessitait d’estimer la valeur vénale de l’immeuble. L’Administration a utilisé à cet effet plusieurs procédés : elle s’est basée sur les prix de certaines transactions réalisées dans le même environnement et a par ailleurs utilisé une méthode par capitalisation à partir des loyers de l’immeuble considéré. Le Conseil d’Etat estime cette évaluation suffisamment fiable. Le prix de revient à soustraire de cette valeur vénale correspond quant à lui au prix indiqué dans le contrat de crédit-bail pour l’exercice de l’option d’achat, majoré du montant des loyers que la SCI a dû rapporter à son résultat au titre de l’exercice de levée d’option. En application de l’article 238 sexies B du CGI, elle était en effet obligée de réintégrer la totalité de la part des loyers précédemment déduits excédant les amortissements qui auraient été appliqués en cas d’acquisition directe.

Les contribuables bénéficient de plusieurs options pour prévenir les désagréments d’une taxation immédiate de la plus-value à l’échéance alors que la SCI ne possède pas la trésorerie nécessaire pour y faire face. L’article 93, IV du CGI permet aux membres de la SCI de choisir le report d’imposition de la quote-part de la plus-value correspondant à leurs droits dans l’acte constatant la cession de l’immeuble à la société. La plus-value est alors imposée lors de la cession ultérieure de l’immeuble par la SCI ou, si elle est antérieure, lors de la transmission des parts de la SCI, à titre onéreux ou à titre gratuit. La taxation de cette plus-value peut aussi être empêchée si la SCI choisit l’option pour son assujettissement à l’impôt sur les sociétés avant la levée de l’option d’achat de l’immeuble. La fin du contrat de crédit-bail a alors pour seul effet la taxation de la fraction des loyers excédant les amortissements qui auraient été déduits par le preneur s’il avait eu la propriété de l’immeuble depuis le début.

La levée d’option d’achat d’un contrat de crédit-bail ne peut en soi générer de plus-value mais l’Administration reste fondée à tirer les conséquences fiscales du transfert de propriété que cette levée d’option implique. Une SCI assujettie au régime des sociétés de personnes génère des revenus imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux lorsqu’elle sous-loue un immeuble pris en crédit-bail, et l’entrée de cet immeuble dans son patrimoine, du fait de l’exercice de l’option d’achat prévue au contrat, a entraîné un changement de nature de l’activité exercée. La société a en effet cessé son activité de sous-location au profit d’une activité de location simple, imposable dans la catégorie des revenus fonciers. Alors même qu’aucun acte ne matérialise le transfert de l’immeuble, la cessation de son activité première et la modification de son régime fiscal ont eu pour effet de rendre immédiatement imposable la plus-value acquise à cette date.

L’Administration a pu réglementairement estimer la valeur vénale de l’immeuble à prendre en considération pour le calcul de la plus-value en se basant sur des transactions récentes et en calculant une valeur de l’immeuble par capitalisation à partir des loyers de l’immeuble.

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